Le projet de loi « immigration »avait unanimement fait bondir les associations et acteurs des secteurs de la solidarité, de l’hébergement et de l’accès au logement, tant il contenait des remises en cause de nos valeurs et droits fondamentaux. De l’aveu même de l’exécutif qui avait saisi « les Sages », le texte comportait des mesures « manifestement et clairement contraires à notre Constitution ». Dans son rôle de garant du respect de la Constitution et avec elle des principes fondateurs de l’égalité républicaine, le Conseil constitutionnel a ainsi, dans sa décision, rendue le 25 janvier, largement censuré le texte qui lui a été présenté. Ce sont ainsi 32 des 86 articles qui la composaient qui ont été qualifiés de « cavaliers législatifs », c’est-à-dire sans lien avec l’objet de la loi présentée en fin d’année 2023 au Parlement.
Cavaliers législatifs
En effet, tout au long de la navette parlementaire, avaient été introduits de nombreux amendements dont l’application aurait ciblé directement nombre de salariés et leurs familles d’origine étrangère et en situation de précarité. Ces derniers introduisaient notamment des conditions d’accès aux prestations sociales et familiales de nature à fragiliser plus encore les ménages les plus modestes. L’article 19 prévoyait par exemple de devoir justifier de résider en France depuis au moins 5 ans, ou d’une durée d’affiliation de 30 mois au titre d’une activité professionnelle en France, avant de pouvoir bénéficier des allocations logement ou du DALO. Le collectif « Nos services publics » avait ainsi estimé que cette loi aurait potentiellement impacté négativement au moins 110 000 personnes et parmi elles 30 000 enfants. Le collectif soulignait par ailleurs la « forte remise en cause du principe d’inconditionnalité », socle de notre système de solidarité, reniement qui ouvrait potentiellement la porte à « une dégradation des droits sociaux de l’ensemble de la population ».
Le sort des jeunes majeurs
Toutefois, des inquiétudes continuent de planer autour du sort réservé par la loi aux jeunes issus de la protection de l’enfance comme s’en alarme le collectif Cause Majeur !. L’article 44 remet en effet en cause la loi « Taquet » de février 2022 imposant aux départements de proposer un accompagnement aux jeunes majeurs de 18 à 21 ans puisque les jeunes adultes faisant l’objet d’une obligation de quitter le territoire français en serait exclus. Le collectif alerte également sur d’autres articles qui viendrait freiner la régularisation des jeunes en limitant les possibilités de renouvellement des titres de séjour et en renforçant les attentes quant à la pratique du français.
Restons vigilants.
Si la décision du Conseil constitutionnel est venue recadrer un texte contraire aux valeurs les plus fondamentales de notre pays en mettant un coup d’arrêt à des mesures risquant de précariser encore des personnes aux situations déjà fragiles, donnant de ce fait une leçon de droit à celles et ceux qui seraient tentés de céder au chant des sirènes de la préférence nationale, la vigilance doit rester de mise. Pour nos associations, plus qu’un avertissement, cette tentative de balayer d’un revers de main nos principes les plus élémentaires doit être un signal d’alarme quant à la fragilité de ce qui devrait rester d’inflexibles acquis. La force de notre pays réside dans son ouverture au monde.